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Allers et routards
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10 novembre 2008

De Chaunaca à Maragua

DSC_0349Jeudi 16 octobre au matin, nous partons hors de Sucre. Depuis que je suis en Bolivie, je n'ai fait que visiter des villes, et y'en a marre. Le lonely planet nous conseille d'aller faire un tour dans la cordillère de Los Frailes, et de rencontrer les Jalq'a, une communauté indigène quéchua qui a développé une forme de tourisme leur permettant de gagner des ronds tout en gardant leurs traditions. Une forme d'écotourisme, quoi. Marta, Pamela et moi sommes rudement emballés. Eugène est tenté mais ne réveillera finalement pas à temps. Nous prenons un taxi vers le "terminal de bus", qui est plutôt un vaste marché avec des camions qui partent dans toutes les directions. Le temps est au beau fixe, le marché est exotique, et les camions respirent la poussière. Des boliviens de toutes les couleurs s'y promènent, vendent, achètent, négocient, mangent par terre, ou bouclent leur sac. Les mères de famille trainent leur mioches dans leur agayo, sur leur dos, tandis que les petits frères, des gamins morveux, courent après des poules.

Nous trouvons donc un camion pour Chaunaca. La remorque est remplie de boliviens qui machouillent des feuilles de coca, de mômes qui têtent le sein de leurs mères, de sacs de pommes de terre, de tomates, de bananes, ou d'autres denrées plus solides qui constitueront les seuls sièges acceptables du voyage. On nous dévisage, mais qu'est ce qu'ils font là ceux-là ? Pas d'hostilité à bord néanmoins, seulement de la curiosité, et on nous propose ces fameux "sièges", sans pour autant engager la conversation. Après quelques tentatives du genre clown, nous réussissons à arracher des sourires aux enfants étonnés par notre look backpacker, des sourires en coin de leurs grandes soeurs, mais toujours sous le regard vide de leurs progéniteurs.

Après deux heures de voyage poussièreux et cahotant, on nous débarque en pleine campagne. Un panneau crasseux nous indique l'entrée de Chaunaca, et croisons une dame avec son chien. Hola, et basta. Nous arrivons au centre culturel de ce joli petit village entouré par de belles montagnes colorées, et même pas un mouton. Ah si ! Un mouton dépecé et sa peau qui sèchent sur un fil ! Nous trouvons l'école, et on nous fait signe de rentrer. S'ensuit un cours de géographie et de vocabulaire européens, photos à l'appui. Les enfants nous regardent avec de grands yeux, certains font les malins, d'autres se cachent derrière leurs cahiers. Depuis le début de la journée, je suis comme dans un rêve, je ressens enfin cet exotisme, celui de découvrir des gens qui vivent un truc complètement différent de nous, européens.

Suivant une autre flêche qui nous indique le petit village de Maragua, nous tombons sur Felipe. Né à Maragua, parlant le Quéchua pour nous faire découvrir la communauté, et guide à ses heures perdues, nous l'engageons. Nous longeons une rivière aux cailloux multicolores, puis c'est la grimpée, sêche et magnifique. Nous trottons sous le soleil pendant cinq heures sur un sentier bien marqué, environné de montagnes absolument magnifiques, aux spécificités géologiques très différentes. Depuis la verte vallée jusqu'aux versants semi-désertiques, avec au loin (mais pas si loin) des montagnes bleu cobalt aux sommets enneigés. Nous croisons des femmes quéchua en habits typiques, qui rapportent des fagots de bois ou accompagnent leurs troupeaux de moutons ou de chèvres. Nous croisons aussi leurs maisons, isolées au possible, voire même complètement paumées, de pierres et de chaume. Ça a l'air tellement serein comme endroit qu'on se dit qu'on aimerait vivre dans un coin pareil. (Et après on se dit qu'une douche bien chaude et un accès internet, c'est cool aussi).

Les paysages changent, surtout la couleur des pierres, qui, de gris ou de grès passe au violet, au rouge, et parfois au vert ! Nous entrons dans le cratère de Maragua, une dizaine de kilomètres de diamètres, fermé par des montagnes aux versants concentriques. Un spectacle incroyable. Nous pénétrons plus avant dans le cratère, traversons des rivières presque asséchées (c'est bientôt la saison des pluies), des failles rouges ocres et violettes, et rencontrons des enfants qui sortent de l'unique école du coin. Pas plus grands que trois pommes, ils nous demandent des caramelos, voire même de l'argent, ou essayent de nous vendre des fossiles. Moyennant quelques bonbons, je fais des clichés dont je suis très fier, mais je trouve dommage que les bambins aient déja un rapport vénal quant aux touristes. Les derniers que j'ai rencontrés, deux petites filles, m'ont jeté des pierres car je n'avais pas de bonbons ! Même de loin et sans risques, j'ai été choqué. On est où là ?

Felipe nous ammène au centre du village et nous fait rentrer chez des gens, une famille constituée de la mère qui tisse un aqsu, produit aux motifs très complexes typiquement Jalq'a, de cinq mômes de différents âges qui martyrisent le petit âne ou qui marchent à 4 pattes dans le "jardin", un espace clos poussièreux jonché d'ordures, sous les yeux ternes de la grand-mère. Et là je me dis que plutôt que d'apprendre à détester les touristes, les parents devraient apprendre à leurs enfants à aimer leur pays. Ce n'est quand même pas compliqué de jeter une bouteille ou un sac en plastique à la poubelle. Le cadet, qui rampait derrière la porte, a été sauvé par Marta lorsque le cadet un peu plus grand a ouvert la porte violemment, un gros bout de ferraille rouillé au niveau de sa tête. Pas même un remerciement de la mère.

Les habitants sont au final peu bavards, et Felipe nous présente nos habitations, de très belles maisons chaulées, blanches avec du beau mobilier fabriqué par la communauté. Les lits sont confortables à souhait. Avant le repas, auquel nous ajoutons nos denrées pour l'enrichir, car il est consistant mais maigre, on nous invite à boire un thé dont nous ne verrons jamais la couleur. Le repas s'effectue à la bougie, car le village est dépourvu d'électricité, en compagnie de deux françaises que nous avions rencontré à Sucre la veille. Le chef de la communauté, Marcelo, vient nous rendre visite, et nous explique un peu son fonctionnement. S'ensuit un repos bien mérité !

Plus de photos ici

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